(Crédits photo : gazzetta.it)

Ce sont deux générations du cyclisme italien qui se présentent à nous. D’un côté, Vincenzo Nibali qui, enfin vêtu de son maillot rose, semble à l’approche de la trentaine être capable d’aller encore plus loin. Son objectif est annoncé : Giro + Vuelta + Championnats du monde. On regrette déjà son absence sur les routes de la Grande Boucle mais il faut bien se faire une raison. Un mec qui paraît humble, qui a baigné dans le vélo depuis tout petit et qui n’a eu cesse d’arborer une certaine patience afin d’atteindre les sommets. N’hésitez pas à relire son portrait proposé en début de Giro.

De l’autre côté, Danilo Di Luca, oui cet homme est (était?) une gloire pour le cyclisme italien, pendant des années il était sur le devant de la scène : victoires notamment sur le Giro et Liège-Bastogne-Liège en 2007. Parfois, le mythe s’effondre, déjà en 2007 après une très bonne saison : le dossier de son implication dans l’affaire « Oil for Drugs » est classé, mais le Comité Olympique Italien lui inflige trois mois de suspension. Voilà le premier faux pas de Danilo, le natif de Spoltore va continuer sa longue fuite en avant.

Il déraille totalement sur le Tour d’Italie 2009 avec deux contrôles positifs. C’est devant son public qu’il quitte la course, Di Luca tel qu’on l’a connu n’existe plus. La bonne blague : il écope de deux ans de suspension mais grâce à sa bonne collaboration avec les autorités anti-dopage, il bénéficie d’une remise de peine et prendra une année sabbatique. De retour en compétition, celui qui est censé avoir appris de ses erreurs, se heurte une période de disette et l’on pense à juste titre que le briscard va tirer sa révérence mais surprise : sa nouvelle équipe Vini-Fantini débarque sur ce Giro 2013 avec Danilo Di Luca en tête d’affiche et le vieux étonne, à l’offensive, il passe à deux doigts d’une victoire d’étape et ne semble rien avoir à envier à ses jeunes camarades. Pourtant, Danilo débutait sa saison sur cette course … plus besoin de préparation ? Le cyclisme moderne est épatant !

Mais le 24 mai, son histoire au sein du cyclisme professionnel prend définitivement fin (espérons-le) : contrôlé positif à l’EPO, Danilo quitte le navire, viré par son équipe et sous la menace d’une suspension à vie. Le jubilé de Danilo Di Luca sur le Giro 2013 aura donc tourné au pugilat.

Son équipe ? Revenons-y, la Vini Fantini par une déclaration de son manager nie en bloc toute implication et rejette même à l’effet de « buzz » l’apparition de Di Luca dans ses rangs. Ridicule ? Un peu tout de même…

« Il ne faisait pas partie de notre équipe, il n’était pas désiré et nous ne l’avons intégré au groupe que sur demande de notre sponsor, Valentino Sciotti, par amitié et en raison de la proximité géographique avec le coureur. »

Ok, le cyclisme c’est du business. En tout cas, ça semble se limiter lorsqu’on entend la déclaration d’Angelo Citracca.
Encore plus ridicule, lorsque l’on se penche sur l’effectif de cette équipe dont le leader Mauro Santambrogio (vainqueur de la 14ème étape) est dans les petits papiers de l’affaire Mantoue (une affaire de dopage made in Italie). Alors, de qui se moque t’on ?

Mais attention, Danilo n’est pas le seul à s’être grillé durant ce Giro.  On considère souvent que les français ne se dopent pas ou plus, »bah oui sinon ils gagneraient le tour » : vous n’avez jamais entendu cette réplique culte dans un bar PMU en juillet ? Pourtant, les français peuvent aussi être touchés par les cases de dopage et c’est Sylvain Georges (AG2R) qui nous le démontre sur ce Giro, contrôlé positif à une substance « légère ».

Je vais en profiter pour saluer la décision courageuse de l’AG2R qui fait le choix de ne plus s’aligner sur le Dauphiné Libéré, une épreuve pourtant cruciale pour une équipe de ce calibre. Mais Vincent Lavenu l’a confirmé ce mardi : pas de Dauphiné pour ses hommes, l’UCI valide l’absence de l’équipe et déclare ne pas lui infliger d’amende. Heureusement, imaginez que l’équipe prenne ses responsabilités face à l’indélicate situation de son poulain et que l’UCI lui fasse à l’envers…

« L’équipe reste droite dans ses bottes, elle assume ses engagements vis-à-vis du MPCC et de la lutte antidopage même si ce n’est pas facile et si l’on est très pénalisé. On respecte les règles telles qu’elles sont écrites. Il y a eu faute et tout le monde est pénalisé. » a déclaré Vincent Lavenu.

Mais qu’est-ce donc que ce MPCC ? Il s’agit du Mouvement pour un Cyclisme Crédible qui regroupe 19 équipes professionnelles, leur objectif est de respecter scrupuleusement les règles anti-dopage de l’UCI mais surtout de les dépasser. C’est cela qui explique la décision de l’équipe AG2R : si deux contrôles s’avèrent positifs sur une même année, l’équipe en question adopte un retrait d’une semaine de course. Vous trouvez ça seulement symbolique ? Oui, ça l’est mais lorsque ça vous fait sauter une course comme le Dauphiné Libéré : c’est bien plus que ça ! La première fois en 22 ans que la formation française ne s’alignera pas sur les routes du soleil. Du soleil … ? On verra ça la semaine prochaine !

Une lutte anti-dopage à deux vitesses : une équipe qui prend une décision douloureuse alors que son cycliste est positif à une substance en vente sans ordonnance… tandis que la Vini Fantini se pavane au départ du Tour d’Italie avec un multi-récidiviste Danilo Di Luca, véritable vitrine de l’heure de gloire du dopage italien.

Peut-être qu’un jour les choses changeront… peut-être.