Pour Pauline Ferrand-Prévot, le début de ces Mondiaux à Ponferrada n’avait rien de rêvé. Dimanche dernier, le bal s’ouvrait lors du contre-la-montre en équipe par une incroyable chute collective de sa formation Rabobank-Liv.

Une semaine plus tard, la Rémoise de 22 ans remporte l’épreuve en ligne des Mondiaux devant Lisa Brennauer et Emma Johansson. De la détresse à la liesse, en une semaine, Pauline Ferrand-Prévot en aura vu de toutes les couleurs et ce maillot arc-en ciel lui va à ravir.

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Alors cette course ?

Un départ rêvé.

39 nations. 134 coureuses. Une lumière magnifique sous le soleil ibérique du côté de Ponferrada. Tous les ingrédients étaient en place pour fournir au public, massé en nombre sur le bord de la chaussée, un petit joyau de cyclisme. Le parcours féminin de ses Mondiaux se composait de 7 tours d’un circuit de 18,2km, marqué par deux côtés par tour. Des nations fortes se sont rapidement dégagées, en partie du fait de leur supériorité numérique. Nous voyons les Pays-Bas de Marianne Vos prendre très tôt l’emprise sur la course avant d’être remplacés par les allemandes, qui semblent bien décidées à durcir le tempo. Ce début d’épreuve est donc placé sous le signe du contrôle mais un fait de course va venir briser la quiétude apparente.

Lucy Garner chute, le peloton contrôle.

Après un peu moins d’une demie-heure de course, le peloton termine son premier tour. La double championne du Monde junior, Lucy Garner chute dès l’attaque du second tour et elle devra redoubler d’effort afin de rejoindre le reste des troupes. Une tuile pour les britanniques, une petite frayeur pour Lizzie Armistead, qui pouvait voir en sa compatriote un formidable appui pour le final. La course semble enfin s’agiter avec une tentative de l’Israëlienne Shani Bloch. En vain. La meute ne semble pas vouloir laisser de bon de sortie et les grosses écuries s’appliquent à augmenter le rythme. L’Allemagne et les Pays-Bas voient la France et l’Italie les rejoindre aux avant-postes.

Dégringolade en série.

Durant le second tour, alors que le peloton s’engage dans la descente de la seconde difficulté, c’est un improbable enchaînement de chutes qui vient surprendre les coureuses. Du monde sur l’asphalte, du monde dans les fossés et des images qui font peine à voir. Les ambulanciers s’agitent et plusieurs participantes se voient dans l’obligation de renoncer, premier moment d’émotion sur ces Mondiaux. Et loin d’être positif.

C’est un pack désorganisé qui poursuit la course, beaucoup de participantes ont été retardées, à l’image de Marianne Vos, ses coéquipières donneront tout pour la ramener à l’avant. Beau travail d’équipe, la championne du Monde est de retour aux côtés de ses principales adversaires. C’est un peloton décimé qui déboule sur le troisième tour, constitué de 77 unités. Toutes les grandes favorites semblent encore dans ce groupe. Ce tour va surtout permettre à beaucoup de changer de vélos, de régler quelques pépins de transpondeurs. La course reprend vraiment lors du quatrième tour.

Et c’est par l’attaque de la Slovène Spela Kern que tout le monde comprend que la course est réellement repartie. L’écart grimpe à 40 secondes mais chutera finalement. Difficile pour la Slovène de lutter face à un peloton où les gros moteurs se mettent en marche. Cette dernière sent le souffle chaud de la meute derrière elle et la rattraper lors du 6ème tour. Un peu moins de 50 bornes de l’arrivée lorsque hollandaises et italiennes prennent l’ascendant. Rien de très significatif cependant, puisque la course se calme de nouveau.

Multiplication des offensives.

Dès le début de l’avant dernier tour, les tentatives vont se multiplier. C’est l’américain Alison Powers qui lance les hostilités avec une attaque tranchante. Pour rappel, cette saison, Alison avait remporté les Championnats des Etats-Unis sur route en la jouant de la même façon. Le vent de face n’aide en rien la tentative en solitaire de l’américaine. Dans l’ascension, elle voit revenir un gros groupe mené par Lizzie Armistead. Lors du regroupement, alors que sa coéquipière se fait avaler par le peloton, Evelyn Stevens tente de gicler mais ses concurrentes sont attentives et ne lui laissent pas de champ de manœuvre. Et là ? C’est la pluie qui vient se mêler à la course. Il reste 30 bornes à parcourir. La chaussée est glissante, les visages se tendent un peu plus.

Les tentatives continuent avec pas mal de coups d’épée dans l’eau de la part des britanniques. L’australienne Rachel Neylan tente aussi et crée un écart minime. L’intérêt ? Forcer les concurrentes de sa leader, Tiffany Cromwell, a travailler dans la poursuite et à y laisser un peu plus d’énergie. Rosella Ratto jaillit, Lizzie Armistead saute dans sa roue. La course s’est réellement durcie et il ne reste plus qu’une quinzaine de concurrentes dans un groupe de tête rassemblé. Marianne Vos, en personne, mène la danse dans la descente.

Un dernier tour et puis s’en va.

Le dernier tour s’engage et les attaques fusent, des groupes se forment et se déforment pour finalement retrouver de nouveau, à 11 km de l’arrivée, toujours un gros groupe de favoris. Marianne Vos, l’hollandaise volante, justifie son statut de favorite en durcissant la course, elle se retrouve aux avant-postes avec un groupe aminci, d’une dizaine de prétendantes au titre ultime. La dernière ascension s’annonce décisive et, à 5km de l’arrivée, la Suédoise Emma Johansson tente sa chance, rapidement accrochée par Marianne Vos et l’Italienne Elisa Longo Borghini. Ces trois là basculent en tête au sommet. Johansson mène ce groupe avec une détermination incroyable mais ce n’est pas la seule à être déterminée, loin de là ! Marianne Vos mène la chasse et rejoint le trio de tête. L’osmose ne semble pas régner en maître au sein du quatuor et l’attaque de Longo Borghini en est l’illustration.

Au jeu du sprint, PFP en impose !

Elizabeth Armitstead, Marianne Vos, Elisa Longo Borghini et Emma Johansson semblaient bien parties pour se disputer la victoire finale. Mais le Championnat du Monde est une course très particulière, l’enjeu est très important et les quatre championnes se sont regardées de trop près.

Derrière elles, les poursuivantes remontent. La jonction va avoir lieu. Un petit groupe avec notamment Lisa Brennauer, Giorgia Bronzini et Pauline Ferrand-Prévot, revient sur la tête de course. Avec deux spécialistes du sprint dans le groupe, Giorgia Bronzini réputée pour sa pointe de vitesse et Marianne Vos que l’on ne présente plus, on sait que l’arrivée va être très rapide. Le sprint est inévitable et elles sont une dizaine à être encore en mesure d’enfiler la tunique arc-en-ciel. Marianne Vos lance le sprint de loin mais ne parvient pas à contenir le retour de ses concurrentes. Elle voit sa coéquipière chez Rabobank-Liv, Pauline Ferrand-Prévot, débouler sur la droite de Lisa Brennauer et s’imposer sous le regard ébahi du public espagnol.

Merci Pauline, merci la sélection française !

Une victoire qui vient conclure la saison magnifique de Pauline. Première française à cumuler quatre titres de championne de France la même année, une victoire sur une manche de Coupe du Monde avec la Flèche Wallonne, sa deuxième place sur le Giro Rosa (deuxième française à monter sur le podium de la course depuis sa création) et désormais le Championnat du Monde.

C’est une incroyable page du cyclisme français qui s’écrit donc à Ponferrada. Pauline Ferrand-Prévot met fin à des années de disette. Il s’est écoulé presque 20 ans depuis le dernier titre de championne du Monde de Jeannie Longo (en 1995). À 22 ans, la française pose la dernière pierre de son incroyable saison sur le cicuit des Mondiaux. Merci à Pauline et à la sélection française de nous avoir fait tant rêver. Il est beau de rêver, maintenant, il est temps de réaliser que l’exploit est bel et bien réel.

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Crédit photo: Page Facebook Pauline Ferrand-Prévot / Yves-marie Drouglazet

Et notre nouvelle championne du Monde n’oublie pas ses coéquipières de l’équipe de France, dans une interview accordée à Directvelo, PFP déclare :

Je tiens vraiment à remercier toutes les filles de l’Equipe de France. Nous avons pu passer une superbe semaine toutes ensemble. On a plus rigolé qu’autre chose. Cela fait sans doute partie de la préparation : être sérieux mais sans se prendre au sérieux. C’est sans doute ce qui a fait que j’étais assez détendue aujourd’hui et finalement assez sereine avant d’entamer ce Championnat du Monde.

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Rédaction commune: Alex et Séb