Un Polonais vient de s’imposer sur la quatorzième étape de cette Grande Boucle, un parcours très sélectif pour cette deuxième journée alpestre. Le tracé n’offrait que peu de répit au peloton avec l’effroyable enchaînement des cols du Lautaret et de l’Izoard avant de grimper jusqu’au sommet de Risoul. Un sommet dompté par Rafal Majka, le jeune polonais qui démontre ici qu’il est tout à fait possible d’accumuler Giro et Tour de France, en brillant !

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C’était donc lors de cette quatorzième étape que les coureurs allaient se frotter à un col mythique, le toit de cette édition 2014, à savoir le col de l’Izoard. Qui ne rêverait pas d’attaquer le pied de ce monstre en devançant le peloton, profitant donc d’un public nourri par l’attente d’avoir le privilège de voir passer au plus près les champions qui font et perpétuent l’histoire des sommets alpins ?

Cela fuse très vite au sein du peloton avec notamment une tentative de Sylvain Chavanel. On imagine mal le français dompter le final de l’étape mais après tout, qui ne tente rien n’a rien et on ne reprochera jamais à Mimosa de mouiller le maillot. « C’est un Tour pour les grimpeurs » lancera t’il en fin d’étape. Les tentatives pour former la bonne échappée restent vaines et dès les premières bosses, certains comprennent qu’il va être difficile de s’accrocher. Le vent n’aide pas et les français commencent à se faire peur, Thibaut Pinot (FDJ) et Romain Bardet (AG2R) se retrouvent piégés par une cassure alors que Vincenzo Nibali (Ast) est bien au chaud dans ce que nous qualifierons de « peloton de tête ». Heureusement pour nos jeunes pousses, le regroupement s’opère et le visage de la course reprend des traits moins inattendus. Rafael Valls (et non pas Manuel, présent sur cette étape) abandonne, souffrant de douleurs au genou.

Qui dit peloton regroupé dit tentative d’échappée et cette fois-ci ce sera la bonne ! Du monde s’envole vers les avant-postes, 17 fuyards dont les français Cyril Gautier (Eur), Nicolas Edet (Cof) Amaël Moinard (BMC) et Christophe Riblon (AG2R). Avec eux, de très bons camarades comme Purito Rodriguez (Kat) bien décidé à empocher des points ou plutôt des pois aujourd’hui, Rafal Majka (Saxo) et son coéquipier Nicolas Roche, Mikel Nieve (Sky), Peter Sagan et De Marchi pour la Cannondale. Au pied du Lautaret, le gros groupe compte quatre minutes d’avance sur un peloton dont le tempo mollasson est donné par les coéquipiers de Leopold König (NetApp).

PURITO, LES POIS SINON RIEN.

Après le roulant col du Lautaret, c’est l’Izoard qui vient refroidir les ardeurs des non spécialistes de la grimpette : Sagan lâche très vite prise. Le slovaque aura encore fait preuve de courage avant de rejoindre quelque temps plus tard l’arrière de la course où les grosses cuisses souffriront une fois de plus. Le toit du Tour fait des dégâts et l’échappée explose littéralement ! Gautier s’écroule, Christophe Riblon le suit et il ne sera pas le seul. Taaramäe est lui aussi scotché sur l’asphalte, cette étape ne lui laissera pas un souvenir impérissable ! C’est finalement un quatuor qui s’arrache tandis que l’Izoard livre ses derniers pourcentages. Au sommet, Purito Rodriguez passe en tête emmenant dans son sillage Nieve, Majka et Herrada (Mov). Finalement, une partie du groupe originel se retrouve dans la descente, 11 hommes sont dorénavant en tête de course.

DÉCROCHE-MOI SI TU PEUX.

Le peloton aborde à son Tour la descente de l’Izoard, rusés comme des renards, les Terre et Ciel d’AG2R s’engouffrent avec brio dans l’exercice de la descente, Bardet et Péraud étirent et décrochent même pendant quelques virages le reste du groupe maillot jaune. À propos de Nibali, pas d’inquiétude puisqu’il s’agit là d’un excellent descendeur si ce n’est le meilleur descendeur du peloton. Ce n’est pas le cas de Thibaut Pinot, et AG2R tente donc de le pousser dans ses derniers retranchements. Bien tenté pour éloigner le leader de la FDJ du maillot blanc mais cela ne suffira pas, Pinot reste concentré et recolle dès que le terrain lui offre plus de sécurité. Bien tenté les gars, mais ce ne sera pas pour aujourd’hui !

DE LA BOMBE, BÉBÉ !

Ça sent bon le terminus et du côté des échappés, pas de pitié pour les croissants ! Alessandro De Marchi attaque, lui qui connaît si bien l’arrivée (NDLR : il s’y était imposé en 2013 lors du Dauphiné). Mais la beauté de ce sport, c’est aussi qu’il soit totalement imprévisible et l’italien ne pourra rejouer sa plus belle partition. C’est finalement Rafal Majka, second hier, qui met les gaz à près de 9 bornes de l’arrivée et s’envole vers une victoire de prestige.

Derrière, l’écrémage a bien évidemment eu lieu mais tout le monde attend fébrilement que les costauds remuent. Ça frotte pas mal, nous sommes ravis de retrouver un brin d’envie et de fougue avec Valverde qui lance les hostilités mais le regroupement est inévitable. Côté français, Péraud, Bardet et Pinot sont toujours dans le groupe maillot jaune qui devient très vite… un groupe sans maillot jaune. Car une fois de plus, Vincenzo Nibali, part de loin (4km de la ligne) et surtout qui part seul. Le Requin de Messine est-il un solitaire ? C’est surtout que personne n’est en capacité de le suivre ! Mais si ! Qui est donc dans la roue de l’italien ? C’est Jean-Christophe Péraud qui ne le lâchera plus jusqu’au terme. Belle opération pour celui qui, comme en atteste ses déclarations d’après-course, ne veut pas encore s’affirmer leader d’AG2R. Le « duo jaune » ne reviendra pas sur le polonais du jour, Rafal Majka savoure la plus belle victoire de sa jeune carrière, il a bien raison ! Si Alberto Contador était encore en course, il serait difficile d’imaginer un pareil scénario. Un mal pour un bien.

La partie de manivelle continue avec un Valverde (Mov) qui grimace, décroché par les français Pinot et Bardet qui ne pourront se départager. Une belle image que de les voir sprinter pour atteindre cette satanée ligne. 25 secondes derrière Nibali et Péraud, bravo les mecs ! À noter tout de même le très bel effort de Tejay Van Garderen (BMC) qui les aura énormément aidé dans le final. Valverde (Mov) n’aura pas su s’accrocher comme la veille et concède 34 secondes à ses poursuivants directs mais sauve sa seconde place au général. Le Tour est loin d’être joué mais la mélodie alpestre nous a livré de magnifiques sonorités.